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AfricaNenda & GIMAC: Bâtir un écosystème de paiements inclusifs en Afrique centrale

par Jamelino Akogbeto, Directeur Régional Afrique de l’Ouest et du Centre d’AfricaNenda Foundation - 25 août 2025

En Afrique centrale, près de 60 % des adultes restent exclus des systèmes financiers formels. Pourtant, les téléphones portables ont déjà ouvert la voie à une révolution silencieuse. Le problème ? Les paiements numériques évoluent encore en silos, freinant leur plein potentiel. C’est ce que veulent changer AfricaNenda Foundation et le Groupement Interbancaire Monétique de l’Afrique Centrale (GIMAC) grâce à un partenariat stratégique lancé en septembre 2023.

Leur ambition : bâtir un écosystème interopérable sécurisé et accessible à tous dans les six pays de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). En clair, permettre à un commerçant du Cameroun d’accepter, sans complication, un paiement provenant du compte mobile d’un client congolais.

«Nous voulons que les paiements soient aussi simples et universels qu’un SMS,» explique  Jamelino Akogbeto, Directeur Régional Afrique de l’Ouest et du Centre d’AfricaNenda Foundation.

De la vision à l'action

Du 12 au 14 mars 2024, Douala a accueilli le premier atelier régional afin de poser les bases de ce partenariat technique et stratégique.

Durant trois jours, les représentants des six pays membres de la CEMAC, et les participants, institutions bancaires, établissements de microfinance, opérateurs de mobile money et fintechs, ont échangé autour des enjeux liés à l’inclusivité des systèmes de paiement et des bonnes pratiques internationales.

«L’enjeu dépasse la technologie. Il ne suffit pas de connecter les plateformes, il s’agit de créer un cadre harmonisé qui bénéficie autant aux commerçants qu’aux consommateurs », observait Valentin Mbozo’o, Directeur Général du GIMAC. « Et dans le même temps, il faut bâtir la confiance, simplifier les usages et garantir que les plus vulnérables y trouvent leur place. »

Les discussions n’ont pas seulement porté sur l’architecture des systèmes, elles ont également exploré les défis réglementaires, la protection des consommateurs et l’expérience utilisateur. Des experts ont partagé les leçons tirées d’autres systèmes de paiements instantanés notamment ceux du Brésil (Pix) et de l’Inde (UPI – Unified Payments Interface) souvent cités comme modèles.

« L’atelier de Douala a permis le partage des standards internationaux, l’identification des défis réglementaires et commerciaux, ainsi que la définition de pistes pour une adoption élargie du système GIMACPAY », précise Jamelino Akogbeto.

Un chantier ambitieux

Une phase de mise en œuvre a démarré en juillet 2025 expérimentant un système de paiement marchand via QR code avec la revue du modèle économique et des règles opérationnelles et particulièrement la gestion des réclamations. Les recommandations seront discutées avec les participants du système puis adoptées par le GIMAC.

Au centre du projet se trouve GIMACPAY, l’infrastructure régionale qui relie déjà banques, institutions de microfinance et opérateurs mobiles et fintechs. Un réseau existe mais son potentiel reste sous-exploité, notamment pour les paiements marchands et les transactions transfrontalières.

Malgré l’enthousiasme, les obstacles sont réels et le chantier est colossal. Pour AfricaNenda Foundation, le succès passera par un accompagnement rapproché :

  • Améliorer la coordination entre les parties prenantes,
  • Optimiser l’expérience utilisateur pour la rendre intuitive,
  • Adapter les solutions aux besoins des populations non bancarisées, souvent éloignées des grands centres urbains.

«L’inclusion financière ne se décrète pas. Elle se construit pas à pas, en écoutant les utilisateurs et en adaptant les solutions à leur réalité,» souligne M. Mbozo’o.

Vers une finance plus inclusive

D’ici 2030, AfricaNenda et le GIMAC veulent permettre à chaque habitant de la CEMAC, du vendeur de poisson de Douala au cultivateur de cacao d’Obala de pouvoir envoyer et recevoir des paiements instantanés, peu importe sa banque ou son opérateur.

Ce projet, qui mêle expertise technique, appui institutionnel et vision inclusive, pourrait bien être un tournant majeur pour l’intégration financière de la région.

« L’avenir des paiements en Afrique centrale ne se jouera pas seulement sur les serveurs et les normes, mais dans la capacité à embarquer toute une population dans cette transition numérique. » conclut Jamelino Akogbeto.


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